Création de site web : pourquoi la tarification au nombre de pages ne fait plus aucun sens
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Création de site web : pourquoi la tarification au nombre de pages ne fait plus aucun sens

Tarification au nombre de pages : c’est fini!

Tu es webmaster ou web designer, et tu vends des prestations de création de site web? Tu te demandes combien facturer à tes clients?

Si tu utilises WordPress, tu ne devrais plus facturer à la page! La tarification au nombre de pages est une méthode ancienne qu’il faut éliminer de son mode de tarification lorsqu’on travaille avec un CMS comme WordPress. Mais pourquoi donc:

  • La majorité des thèmes et constructeurs de pages WordPress s’appuient sur un système de réutilisation des composants. Par exemple, sur un site qui fait 10 pages, faut-il créer l’en-tête, le menu principal et le pied-de-page 10 fois? Évidemment que non. Quand je crée un site avec le thème Kadence et les blocs Gutenberg, j’utilise les hooked elements fournis par Kadence Pro pour créer des sections réutilisables. Ce sont des éléments que je crée une fois, et que je réutilise aux endroits nécessaires sur le site. Le thème Divi a également un système similaire avec ses modules globaux et le Divi Theme Builder.
  • La tarification au nombre de pages ne prend pas en compte les coûts fixes de mise en place du site web. Choix de l’hébergeur, installation de WordPress, implémentation de la charte graphique, sécurité, et bien d’autres. Ce sont tous des livrables du projet web qui doivent généralement, à moins de spécificités, faire l’objet d’une tarification fixe. Si on prend un site de 10 pages, versus un site de 1000 pages, l’installation de WordPress te générera la même charge de travail.
  • Ça fait junior. En 2023, quand je vois des consultants web proposer leurs services sur les différents groupes Facebook et LinkedIn, je trouve toujours que ça n’inspire pas confiance. Facturer à la page ne transpire pas la séniorité. Et j’ai souvent l’impression que vendre un site de 3 pages est une mesure désespérée pour aller chercher des clients. Il faut se réveiller : offrir une quatrième page à ton client, ça ne coûte rien de plus, et ça le rend heureux. Client heureux = meilleures chances pour du repeat business.

Bien que ce soit intéressant à lire, je trouve que ce modèle de tarification au nombre de pages est de plus en plus vieillissant.

Alors, on arrête avec la tarification au nombre de pages?

Comment chiffrer un projet web, alors?

Les biais et défis avec lesquels on démarre…

Quand on débute, ce n’est pas simple de trouver le bon positionnement. Beaucoup d’entre nous avons vécu des situations comme celles-ci:

  • Vendre un site 50 € alors qu’on y passe 100 heures. On se justifie en se disant des choses comme “oui mais je ne peux pas facturer ma montée en compétence au client”. Bien oui, en fait. Ou une partie, en tous cas. Le client investit en toi. S’il faisait affaire avec une agence web, le même site lui coûterait 10 k €. Il fait le choix d’aller de l’avant avec un consultant freelance, ça ne veut pas dire gratuit. 100 heures de travail pour se payer “une ref et 3 pizzas”? Non merci.
  • Débuter un projet “au forfait” (si seulement je pouvais double-guillemetter cette expression) sans cahier des charges, et surtout sans avoir fait une réponse unitaire à chaque besoin énoncé dans le CDC. Je vais être direct, une prestation au forfait, c’est rentable lorsque c’est très bien planifié et lorsque la personne qui exécute est à l’aise de travailler en transparence avec le client. Le scope creep en gestion de projets web – accepter l’ajout de features durant le projet qui n’étaient pas prévus au CDC, et donc au chiffrage -, j’en vois tous les jours dans mes coaching et sur les réseaux. Un feature pas prévu et qui vous demande du temps supplémentaire, ça se paye.
  • “Vous m’enverrez votre portfolio“. Non. Je vends des sites web, pas des tapis. (j’aime les tapis et je n’ai rien contre les gens qui en vendent). Le problème est le suivant avec le portfolio : c’est plutôt rare, surtout au début de sa carrière comme consultant freelance, d’avoir un client qui nous donne un budget illimité et totale carte blanche sur le design. En fait, comme on a tendance à baisser ses prix et à avoir le syndrome de l’imposteur au début, on tombe souvent sur des clients qui vont être très pointilleux et qui vont nous forcer à faire des trucs bizarres avec le site. Des jeux de couleurs pas possible. 8 sortes de boutons sur un site de 3 pages. Des animations démodées depuis 20 ans. Mais même en acceptant de faire ces choses et qu’au final ça donne un site dont on est pas toujours fier visuellement, notre travail de pro du web a été bien fait et le client est heureux. C’est juste que… on n’aura jamais envie de montrer ce site.
  • Le syndrome de l’imposteur. J’adore coacher les gens qui ont ce genre de sentiment. Ce sont les meilleurs et je crois fermement qu’ils vont tous nous enterrer. Pourquoi? Ils ont le bon mindset : humble, souci du détail, envie de bien faire les choses. Le fait de douter de sa capacité à entreprendre et à aider quelqu’un est synonyme d’un travail bien fait. Si tu as lis cet article jusqu’ici, tu fais probablement partie de cette gamme de personne unique et très belle. Fais toi accompagner pour te lancer. Il y a plein de bons coaches web dans la francophonie, dont je fais humblement aussi partie.

Les modes d’engagement et la facturation

Commençons pas démystifier et démêler deux concepts fondamentaux : modes d’engagement versus mode de facturation.

Le mode d’engagement définit la base contractuelle sur laquelle le prestataire promet de réaliser les livrables contenus dans sa proposition commerciale. De manière générale, on retrouve deux types d’engagement : le travail en engagement de résultats et le travail en engagement de moyens.

L’engagement de résultatsL’engagement de moyens
Le consultant freelance s’engage à fournir un résultat à son client. Le cahier des charges ainsi que la réponse du consultant sont la base de cet engagement. Le consultant met tout en oeuvre pour atteindre les résultats escomptés.Le consultant freelance s’engage à déployer les moyens jugés nécessaires pour répondre au cahier des charges du client. Ainsi, le consultant n’est pas tenu d’atteindre un quelconque résultat.
Du point de vue du client, les moyens employés pour atteindre le résultat sont souvent transparents. Le client peut s’intéresser tout de même aux moyens, mais est souvent perdu par les fins détails.Le client peut s’intéresser aux moyens mis en oeuvre pour réaliser la prestation. Surtout dans un cas où l’engagement de moyen est couplé à une facturation temps & matériel, le client peut avoir tendance à vouloir surveiller de près car cela impacte directement son portefeuille.
Du point de vue du consultant, cette approche est souvent la plus risquée car elle “oblige” contractuellement de trouver des solutions aux problèmes du projet. Mieux vaut s’y lancer lorsqu’on a une bonne maîtrise technique et méthodologique du sujet que l’on traite.Du point de vue du consultant freelance, cette approche est la moins risquée pour des raisons évidentes.

La facturation au forfait, c’est quand on s’entend avec le client sur une somme fixe pour le projet. Un forfait doit s’appuyer sur quelque chose de tangible. Si on propose un forfait en engagement de résultats, il faut s’assurer d’avoir la bonne compréhension commune du cahier des charges. Il faut également avoir fait l’exercice de prendre une provision pour risque sur le temps nécessaire à la réalisation du projet. Par exemple, le consultant vend un projet de site web 3000 € et le client s’acquitte de la facture conformément aux termes de paiements.

À l’inverse, on peut très bien avoir recours au forfait sur un engagement de moyens. C’est le cas très typique des banques d’heures. Par exemple, le consultant vend 20 heures à 100 € / heure, donc une facture de 2000 €. Ce que le consultant et le client décident, d’un commun accord, de faire avec ces heures leur appartient. On voit souvent ce mode de travail dans les prestations de coaching et dans certaines prestations de maintenance web.

La facturation temps & matériel, c’est quand on refacture le temps réellement passé au client. Le mot matériel inclus les autres dépenses, par exemple d’un plugin WordPress, ou autres. Une facturation temps & matériel couplé avec le mode d’engagement au résultat… je réfléchis et concrètement je n’ai jamais vu cela. Je n’arrive pas à imaginer un modèle qui tienne et qui protège à la fois le client et le consultant. Tu crois avoir trouvé? Dis-le moi.

Le temps & matériel est souvent utilisé avec l’engagement de moyens. C’est possible de le mettre en place quand le client et le consultant freelance commencent à avoir de l’expérience ensemble. Après quelques mois ou un projet qui s’est très bien déroulé par exemple. On commence par s’entendre sur un taux horaire qui convient aux deux parties. Puis on met en place un outil de tracking des heures, avec un Google Sheets ou dans Notion par exemple. Puis à chaque demande client, on note le temps que cela a pris dans l’outil.

À la fin du mois, on fait une facture récapitulative avec toutes les heures et on l’envoie au client. Tu auras compris que le lien de confiance est ultra important ici. Dans ce scénario, le consultant travaille toujours en avance de phase. Le client lui, ne sait jamais combien tes services vont lui coûter le moins suivant. Évidemment, la communication c’est important!

Concrètement, comment faire?

Ça dépend. Il te faut trouver la méthode qui te convienne le mieux. Déjà, je suggère de prendre en compte les points suivants.

Étape 1 > Documenter ses offres

Crée-toi un mapping précis de tes offres. Ça demande d’être un peu cartésien. L’idée est d’avoir une vision à la fois d’ensemble et précise sur tes offres. La méthode que je préfère, c’est un Google Sheets ou un Notion avec les colonnes suivantes :

  • Nom de l’offre
  • À quoi sert l’offre
  • À qui s’adresse l’offre
  • Quelles sont les caractéristiques de cette offre
  • Sur quels mediums je présente l’offre (où peut-on trouver de l’information sur l’offre)
  • À combien j’ai envie de vendre cette offre
  • Est-ce que j’ai des clients historiques à qui je peux demander des témoignages
  • Toute autre info qui t’aide à avancer!

C’est normal de ne pas avoir toutes les informations à cette étape-ci. C’est un travail évolutif, il faut maintenir à jour cette liste et l’améliorer constamment.

C’est important qu’il y ait une certaine cohérence dans ton offre de services. Tu vends des sites web WordPress sur mesure? Tu pourrais aussi vendre de la maintenance et de l’hébergement. Tu pourrais vendre des prestations de création de contenu. Cohérence et hiérarchie!

Étape 2 > L’approche bottom-up : qu’est-ce que mon offre me coûte?

L’idée ici est de partir des caractéristiques de l’offre de création d’un site web et d’en définir les coûts. Encore une fois, ça peut se faire sur une page dédiée dans Google Sheets ou Notion.

On commence par reprendre la liste des caractéristiques de l’offre et on les positionne en ligne dans la première colonne. Dans une seconde colonne, on essaie d’évaluer en heures le temps que chaque caractéristique nécessite.

Par exemple, sur un site WordPress, si on juge que les paramètres de base de WordPress nous prennent 1 heure, alors cela devrait toujours être le cas. Quand on ne sait évaluer avec précision, je préfère toujours en mettre un peu plus.

Ensuite l’idée est de déterminer un taux horaire. Il y a des centaines d’articles de blog sur la question du taux horaire. Chaque consultant a sa propre idée. Évidemment, il n’y a pas de statistiques officielles sur les taux dans le monde du web.

Plusieurs facteurs entrent d’ordinaire en ligne de compte : séniorité, lieu de résidence, type d’expertise, et d’autres. On s’attend à ce qu’une personne plus sénior ait un taux horaire plus élevé. On s’attend à ce que des personnes vivant en Amérique du Nord ou en Europe facturent l’heure un peu plus cher. On s’attend finalement à ce qu’une personne ayant une expertise rare dans un domaine spécifique soit récompensée en adéquation.

Faisons un exemple. Si on juge, dans un projet de site web au forfait en engagement de résultat que notre taux horaire est de 60 €, et que le temps nécessaire à la réalisation du projet est de 50 heures, le prix plancher est de 3000 €. À ce prix, on considère sa rémunération comme juste. Maintenant, il vaut mieux appliquer une provision pour risque. Dans cet exemple, j’ajouterais 15% sur le prix, ce qui permettra de parer à des éventualités imprévues.

Par exemple, si on doit changer un plugin en cours de route et que cela génère des travaux supplémentaires alors la provision pour risque, elle est pour toi! Le client n’en sait rien. Après, j’ai pour habitude dans un projet où tout se passe bien de réutiliser la provision pour des ajouts de dernière minute. Ça fait plaisir au client, et je me sens plus à l’aise avec ça!

Le problème avec cette approche bottom-up, c’est que parfois on arrive à des prix qui sont complètement en marge de ce que fait le marché. Continue ta lecture avec la prochaine section.

Étape 3 > L’approche top-down : savoir être cohérent avec le marché

Si tu vends des sites web WordPress beaucoup plus cher que ce que les autres acteurs du marché proposent, ça ne fonctionnera pas. Par exemple, si tu vends un site 20k € et que les agences digitales facturent la même prestation 12k €, il est fort probable que tu n’auras jamais ou très peu de client. L’écart est trop grand, et la seule chose qui pourrait le justifier serait ton expertise ultra poussée d’un domaine, ou ta notoriété en la matière.

À l’inverse, si tout le monde vend sa prestation de création de site WordPress à 3000 €, mais que tu te positionnes à 300 €, c’est aussi un problème. Vendre trop en dessous du marché évoque toutes sortes de choses : juniorité, manque d’expertise, consultant prêt à travailler pour un rien. Et bien souvent, le type de client que cela attire… n’est pas exactement ceux avec qui tu as envie de bâtir une relation longue durée.

Il est primordial que ton pricing soit cohérent avec ton offre, ton positionnement et le marché.

Je recommande d’abord de faire l’approche bottom-up, puis de sonder le marché. Avec les deux approches mises ensemble, tu devrais avoir une bonne idée de ce que tu es en mesure de vendre.

Conclusion… Fais-toi accompagner

Tu as probablement découvert cet article parce que tu voulais en savoir plus sur la tarification au nombre de pages. J’espère avoir réussi à te convaincre que ce n’est plus la bonne méthode, surtout si tu travailles avec un CMS comme WordPress. La tarification au nombre de pages avait sa place avant l’ère des CMS. Maintenant, c’est tout autre chose.

Le dernier conseil que j’ai sur la tarification et la structuration de tes offres, est de partager avec tes pairs et de te faire accompagner si tu en ressens le besoin. Avoir un œil extérieur sur ses offres et sur son positionnement, c’est toujours bénéfique et ça permet de gagner un temps fou.

Je coache des webmasters, web designers et autres professionnels du web régulièrement et de manière super conviviale sur Zoom. Toutes les informations ici. C’est 100% sur mesure, à ton rythme, en fonction de ton budget. Et en plus, pour un temps illimité, tu auras la chance d’entendre mon bel accent du Québec!

Bon courage!